samedi 6 novembre 2010

Lie to Me ou le cauchemar de Pinocchio

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Un haussement de sourcil, un mouvement des yeux, une crispation des lèvres : rien n’échappe au regard aiguisé de Carl Lightman, scientifique spécialisé dans la détection du mensonge via les micro-expressions du visage et du corps. Séminaire après séminaire, il expose son art à grand renfort d’exemples « people », de l’affaire Lewinsky à Bush et de Nixon à O.J. Simpson. Les résultats obtenus sont tellement convaincants qu’il a monté sa propre société de conseil, le Lightman Group, à laquelle font régulièrement appel la police et le monde politique, mais aussi l’armée, l’administration et les entreprises. Seulement voilà, Monsieur Lightman a le génie sélectif : si aucune vérité ne semble lui échapper dans le cadre de son travail, il n’en va pas de même dans sa vie privée…

Si le postulat de base, « tout le monde ment », rappelle clairement un certain Dr House, c’est bien évidemment au Mentalist que nous renvoie Lie to Me, créée par Sam Baum et diffusée sur la Fox depuis janvier 2009. Deux types doués d’une extraordinaire capacité à décrypter l’humain, régulièrement sollicités par la police pour la résolution d’affaires délicates : une parenté plutôt flagrante mais démentie par Brian Grazer, le producteur exécutif de Lie to Me. Rien à voir, selon lui, entre Carl Lightman et le Mentalist, le premier étant avant tout un scientifique. Outre que les propos de Ben Grazer ne résisteraient probablement pas longtemps à une petite analyse de ses micro-expressions, on est en droit de mettre en doute le caractère scientifique de la méthode employée par Lightman. Réellement fondée par le comportementaliste Paul Ekman dans les années 60, la méthode n’est absolument pas infaillible et ne peut être appliquée à tout suspect selon une même grille d’analyse : tout le monde ment, certes, mais chacun à sa manière. Effectivement employée par le FBI et certains services secrets anti-terroristes, elle ne peut toutefois jamais se substituer – fort heureusement - à une enquête classique. Si la technique employée par Carl Lightman dans Lie to Me est bien évidemment théâtralisée et galvaudée pour les besoins de la fiction, on ose toutefois à peine imaginer les possibles dérives d’une pseudo-science soumise à une telle subjectivité.

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Lie to Me doit beaucoup à l’interprétation de Tim Roth, acteur de cinéma (Dark Water, Don’t Come Knocking, L’Homme sans âge, My Blueberry Nights) interprétant ici son premier rôle pour la télévision et secondé plutôt efficacement par Kelli Williams (The Practice) dans le rôle de Gillian Foster. Le dernier personnage du trio, l’inflexible Ria Torres (incarnée par Monica Raymund), ne parvient en revanche guère à convaincre, tant il est flagrant qu’elle ne sert qu’à incarner la vision naïve et non-initiée du spectateur. Série de facture classique, Lie to Me ne prend aucun risque et se contente de proposer un condensé d’un certain nombre d’ingrédients télévisuels de ces dernières années : un personnage central plutôt grande gueule, vaguement irrascible et néanmoins doté d’une capacité d’analyse qui confère au génie (lui assurant succès professionnel et déroute personnelle) ; la résurgence de la figure du détective, toujours prêt à collaborer avec la police mais foncièrement indépendant ; l’importance croissante de la science dans les enquêtes policières ; la structure, enfin, stable et immuable, du « formula show », jonglant souvent entre deux enquêtes au cours d’un même épisode pour lui donner plus de rythme.

Il n’en reste pas moins que Lie to Me remplit son contrat d’honnête divertissement et se regarde avec un certain plaisir, dès lors que l’on se résigne à ne pas s’aventurer hors des sentiers balisés.

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